Sommaire :
I) L’importance de mesurer les troubles anxieux et la dépression
Il nous arrive à tous de nous sentir angoissés. Du stress quotidien à l’anxiété chronique, le spectre des angoisses est vaste.
L’anxiété est le plus courant des troubles mentaux du monde.
Les troubles anxieux touchent près de 22% de la population française. Le trouble anxieux généralisé étant le plus répandu (12,8 %), mais il ya aussi l’anxiété sociale, l’agoraphobie, les TOC, troubles obsessionnels compulsifs, etc.
Les femmes et les personnes à faible revenu ont été identifiées comme les plus à risque.
Je vous avais déjà expliqué que vos émotions et vos pensées peuvent jouer sur votre santé, par exemple l’optimisme face aux risques d’AVC.
Malheureusement ici, des preuves sont apparues selon lesquelles l’anxiété et la dépression sont associées à plusieurs problèmes de santé physique : maladie de la thyroïde, maladie respiratoire, maladie gastro-intestinale, l’arthrite, des migraines et des affections allergiques.
Si on présente un trouble physique, la présence d’un trouble anxieux associé, qui constitue donc une comorbidité, augmente le handicap et diminue la qualité de vie.
Par exemple, en cas de mal de dos, de lombalgie, le risque de chronicité, le risque de voir sa douleur se prolonger au-delà de 3 mois est multiplié par 2 en présence d’un trouble anxieux ou dépressif !
L’épisode dépressif majeur, l’abus d’alcool et la toxicomanie coexistent fréquemment avec les troubles anxieux (respectivement 28,3, 4,4 et 2,8 %).
D’ailleurs, les troubles anxieux et dépressifs diminuent les chances de succès si on veut arrêter de fumer. Ils doivent impérativement être pris en charge.
La dépression est une maladie médicale chronique répandue qui peut affecter les pensées, l’humeur et la santé physique. Elle se caractérise par une humeur maussade, un manque d’énergie, de la tristesse, de l’insomnie et une incapacité à profiter de la vie.
La dépression est un problème majeur de santé. À l’échelle mondiale, il est responsable de plus d’« années perdues » à cause du handicap que toute autre condition.
Classée par handicap et décès combinés, la dépression arrive neuvième derrière les tueurs prolifiques tels que les maladies cardiaques, les accidents vasculaires cérébraux et le VIH.
C’est en grande partie parce que tant de personnes en souffrent – quelque 350 millions, selon l’Organisation mondiale de la santé – et le fait que cela dure de nombreuses années.
Pourtant, la dépression est largement non diagnostiquée et non traitée en raison de la stigmatisation, du manque de thérapies efficaces et de ressources en santé mentale inadéquates. Près de la moitié de la population mondiale vit dans un pays qui ne compte que deux psychiatres pour 100 000 habitants.
De la même façon, l’un des troubles anxieux les plus courants observés en soins primaires est le trouble anxieux généralisé (TAG). Malgré son incidence élevée, seulement 30 % des personnes atteintes sont diagnostiquées.
Il existe pourtant un outil de psychothérapie simple qui permet d’assurer la détection précoce et la prise en charge des états de dépression et d’anxiété : l’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital (HADS).
II) L’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital (HADS)
Cette échelle a été créée en 1983 par les professeurs Zigmond et Snaith, en langue britannique, mais de nombreuses traductions ont été faites et validées depuis.
Cette échelle d’auto-évaluation s’est avérée être un instrument fiable pour détecter les états de dépression et d’anxiété dans le cadre d’une consultation médicale externe d’un hôpital, mais également dans la population générale, même si ce n’était pas pour ça qu’elle avait été conçue.
Les sous-échelles d’anxiété et de dépression sont également des mesures valides de la gravité du trouble émotionnel.
Ainsi cette échelle HAD nous permet non seulement de faire un premier pas vers un diagnostic, mais également de mesurer et donc de faciliter la gestion de l’anxiété et de la dépression.
Car généralement, ce qui se mesure peut être amélioré !
Une étude sur plus de 9700 Français a confirmé l’intérêt de cet outil dans le dépistage et le suivi de la dépression avant et après traitement. Dans cette étude, les scores moyens à l’échelle HAD-D étaient de 19.16 avant et 15.16 après traitement.
Ce test est largement utilisé par les médecins dans la pratique hospitalière, dans les services médicaux et chirurgicaux, mais également dans les démarches de diagnostic et de prévention du stress et des risques psychosociaux liés au travail.
L’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital (HADS) est par exemple utilisée dans la lombalgie chronique, dans l’arrêt du tabac, dans le suivi de patients insuffisants respiratoires chroniques, hémodialysés, cancéreux, dans les troubles dépressifs avérés, aigus ou chroniques, etc.…
La connaissance de votre état émotionnel est importante pour que votre médecin puisse adapter au mieux votre traitement. L’échelle HAD doit aider votre médecin à savoir comment vous vous sentez.
Elle prend la forme d’un autoquestionnaire validé, qui se compose de 14 questions auxquelles un score de 0 à 3 est attribué selon la sévérité du symptôme.
Sept questions se rapportent à l’anxiété (total A) et sept autres à la dépression (total D), permettant ainsi l’obtention de deux scores compris entre 0 et 21, dont l’interprétation est pour chaque échelle.
Par exemple :
Lisez chaque question et entourez la réponse qui s’adapte le mieux à vous pour la semaine passée. Votre réponse ne doit pas être trop réfléchie, mais rapide. Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse.
Pour faire le test :
https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2014-11/outil__echelle_had.pdf
Interprétation
Pour dépister des symptomatologies anxieuses et dépressives, l’interprétation suivante peut être proposée pour chacun des scores (A et D) :
– 7 ou moins : absence de symptomatologie
– 8 à 10 : symptomatologie douteuse
– 11 et plus : symptomatologie certaine.
Selon les résultats, il sera peut-être nécessaire de demander un avis spécialisé.
Mais ces seuils d’interprétation proposés en 1983 par Zigmond et Snaith, ne font pas l’objet d’un consensus.
III) Validité et limites de l’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital (HADS)
Un certain nombre de chercheurs ont exploré les données de l’échelle HAD pour établir les seuils déterminant un cas d’anxiété ou de dépression.
Ainsi, Bjelland et ses collaborateurs en 2002 ont étudié 747 articles qui ont utilisé l’échelle HAD.
Ils ont identifié un seuil de 8/21 pour l’anxiété ou la dépression.
Pour l’anxiété (HADS-A), cela a donné une spécificité de 0,78 et une sensibilité de 0,9. Pour la dépression (HADS-D), cela a donné une spécificité de 0,79 et une sensibilité de 0,83.
En médecine, la sensibilité d’un test diagnostic est ainsi sa capacité à détecter un maximum de malades (c’est-à-dire à avoir le moins de faux négatifs), tandis que la spécificité de ce test est sa capacité à ne détecter que les malades (avoir le moins de faux positifs).
La sensibilité et la spécificité de l’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital étaient similaires à celles retrouvées pour d’autres questionnaires couramment utilisés.
Ainsi selon les chercheurs, l’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital s’est avérée efficace pour évaluer la gravité des symptômes et la présence de troubles anxieux et de dépression chez les patients somatiques, psychiatriques, de soins primaires et dans la population générale.
Roberge et ses collaborateurs en 2013 après avoir observé les résultats de l’échelle HAD sur 14 800 canadiens proposent un seuil à 10 pour l’anxiété et un seuil à 7 pour la dépression.
Par ailleurs, en 2011, Cosco et ses collaborateurs rapportent des limites à cette échelle HAD.
Selon eux, bien que l’échelle HAD se soit avérée être une mesure efficace de la détresse émotionnelle, son incapacité à différencier systématiquement les concepts d’anxiété et de dépression signifie que son utilisation doit être ciblée sur une mesure plus générale de la détresse.
Avis partagé dans une grande lettre ouverte par les chercheurs James Coyne et Eric van Sonderena en 2012 pour qui l’échelle HAD n’est pas un moyen fiable de différencier l’anxiété et la dépression.
Ils rapportent par exemple qu’il arrive que la sous-échelle d’anxiété (le score A) parvienne mieux à prédire un diagnostic de dépression que le score de dépression(le score D) lui-même !
Ainsi selon eux, c’est surtout le score total (A+D) qu’il convient d’observer pour identifier les patients qui ont besoin d’une évaluation plus approfondie de l’anxiété ou de trouble dépressif.
Bien que cela n’était pas recommandé par leurs créateurs en 1983, la somme des deux sous échelles (Score A + Score D) peut être interprétée selon Ibbotson.
de 0 à 14 : pas de troubles anxiodépressifs;
de 15 à 42 : existence de troubles anxiodépressifs.
Mais d’autres auteurs préfèrent un seuil de 13 ou de 16.
L’échelle HAD semble cependant meilleure pour dépister la dépression que l’anxiété (2 items sur 14 apparaissent en effet peu spécifiques de l’anxiété) et certains chercheurs proposent même de limiter le questionnaire à 12 items.
Par ailleurs, les chercheurs rappellent une faiblesse de ce test, car lors de sa création, Zigmond et Snaith ont délibérément écarté les éléments somatiques, pour qu’ils ne faussent pas l’évaluation des sujets vus en médecine et pouvant présenter donc une maladie organique.
Ainsi les éléments liés aux troubles du sommeil ou aux troubles de l’appétit ont été exclus volontairement.
Mais les connaissances cliniques ont évolué et l’on sait désormais que la présence de troubles du sommeil ou de l’appétit peut être un bon indicateur d’une dépression…
Alors que faire avec les résultats de l’échelle HAD ?
IV) Comportement à adopter face à l’anxiété ou la dépression.
L’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital demeure un bon outil de psychothérapie qui vous permettra de faire un premier pas vers un diagnostic d’anxiété ou de dépression et de mesurer vos progrès lors d’une prise en charge de votre détresse émotionnelle.
Mais cet outil ne vous permet pas de distinguer les différents états anxieux ou types de dépression.
Si vos résultats sont supérieurs à 8 sur une sous-échelle ou supérieurs à 15 au total, il convient de consulter un spécialiste, psychiatre ou psychologue certifié, afin d’approfondir l’évaluation puis de mettre en place, si besoin, la prise en charge adéquate.
Et rassurez-vous, ce n’est pas réservé aux fous ! Ces professionnels peuvent vous apporter une aide dans de nombreux domaines !
Face à l’anxiété et à la dépression de nombreux outils pourront vous aider : les thérapies cognitivo comportementales (TCC) pour vous débarrasser de vos idées inquiétantes, l’hypnose, l’activité physique, des exercices de respiration, de relaxation, de méditation (mais attention pas si vous êtes au fond du trou en pleine dépression, comme je vous l’expliquais dans ce précédent article sur les bienfaits de la méditation), certaines plantes et certains compléments alimentaires, une confrontation progressive à vos peurs, un meilleur sommeil, l’acceptation attentive…et bien sûr après avis médical certains médicaments.
Vous trouverez de nombreux conseils pour l’activité physique sur Santé de Faire mais également pour la relaxation dans cette série de vidéo juste ICI.
J’espère que cet article vous aura plu, si c’est le cas ou si vous avez des questions n’hésitez pas à me le dire en commentaire.
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Vous pouvez retrouver la vidéo correspondante à l’article ICI :
SOURCES :
« Trouble d’anxiété généralisée : qu’est-ce qui nous manque ? » Christer Allgulander (2006)
« Santé mentale : un monde de dépression » Kerri Smith (2014)
« L’échelle d’anxiété et de dépression à l’hôpital » AS Zigmond , RP Snaith (1983)
Herrmann, C. (1997). International experiences with the Hospital Anxiety and Depression Scale-A review of validation data and clinical results. Journal of Psychosomatic Research, 42(1), 17‑41. https://doi.org/10.1016/S0022-3999(96)00216-4
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